L’Agence Internationale de l’Energie, un organisme de l’OCDE basé à Paris, vient de publier son rapport annuel « Perspectives énergétiques mondiales 2010 » (Résumé en français téléchargeable sur le site de l’agence ici).
Dans ce rapport, l’Agence utilise pour la première fois l’expression « pic pétrolier » et annonce que le pic de production du pétrole conventionnel est passé en 2006.
Son scénario de l’évolution énergétique mondiale est résumé dans le graphique suivant :
L’ Agence prévoit un pic de production tous pétroles confondus (incluant le gaz naturel liquéfié) en 2035. La croissance de la production montrée sur le graphique correspond a un rythme de croissance annuelle de 1,5 % en moyenne. Or, le rythme de croissance de la demande est actuellement plus proche de 2,5 %, tiré par la Chine et l’Inde. L’AIE espère que le développement des énergies renouvelable et du nucléaire ainsi que l’amélioration des performances énergétiques de ces pays permettront de fournir la différence de 1 %. Mais l’Agence souligne que ce développement est à l’heure actuelle beaucoup trop lent.
La production maximale atteinte en 2035 est de 99 millions de barils par jours (mb/d), soit une baisse par rapport a l’estimation de 2005 (120 mb/ et celle de 2009 (105 mb/d).De fait, l’Agence n’a cessé de revoir ses estimations a la baisse.
En analysant de plus près le graphique on constate :
– la baisse très rapide de la production de pétrole conventionnel après 2010 ( 4 à 6 % par an) ;
– une compensation partielle de cette baisse par la mise en exploitation de gisements connus mais non encore exploités (en gris) ;
– une augmentation de la production de gaz naturel liquéfies (en violet) ;
– une augmentation de la production de pétroles non conventionnels (en jaune) : sables et schistes bitumineux, pétrole lourd du Venezuela, pétroles profonds sous la mer. Une remarque important s’impose : bien que les réserves de pétroles non conventionnels soient plusieurs fois plus élevées que celles de pétrole conventionnelle, la production reste remarquablement modeste. Pourquoi ? Parce que ce sont des pétroles très complexes et très coûteux à extraire, avec un retour sur investissement plus faible, et des émissions de CO2 très élevées à la production. Le rythme technique d’extraction est donc inférieur à celui du pétrole conventionnel.
– enfin, la bande bleu clair correspond à des gisements de pétrole non encore découverts. On ignore donc complètement à ce jour si la production pourra atteindre les niveaux espérés sur le graphique, car le rythme des découvertes de pétrole a tellement baissé depuis la fin des années 70 que les ingénieurs ne voient pas bien par quel miracle les découvertes actuelles suffiront à remplir la bande bleu clair.
Pour finir, l’AIE précise que ce scénario pourra marcher s’il n’y a pas d’ici 2035 de crise économique ou financière qui ralentira les investissement pétroliers, et si la situation politique dans plusieurs pays, notamment l’Irak, se stabilisera afin que ces pays puissent produire à plein rendement.
La somme des conditions optimistes pour arriver à équilibrer ce scénario le rend très incertain. Dans tous les cas, il signifie une énergie et des carburants beaucoup plus chers. Dans son langage diplomatique, l’Agence nous fait comprendre que la fête est finie.